Et l’ordinateur pour les dys ?
Cet aspect n’a pas été abordé dans le Liaisons Laïques sur le numérique à l’école n° 321. Et, pourtant, peut-être est-ce par-là que le numérique sera bientôt dans toutes les classes. On estime les élèves dys à 8 à 10% des élèves, et peut être est-ce encore sous-estimé.
Rappelons que les dys et troubles du spectre autistique sont le résultat d’un trouble neuro-développemental (des neurones mal branchés pour faire court). La dysgraphie est un trouble du langage écrit qui entraine une difficulté majeure à former les lettres et à les écrire avec fluidité.
L’ordinateur est très indiqué pour tous les élèves dysgraphiques. Il y a assez peu d’élèves seulement dysgraphiques. La dysgraphie est plutôt la conséquence des dyspraxies, voire d’autres dys qui peuvent impacter sur l’écriture, notamment la dyslexie et la dysorthographie. Elle entraîne généralement une situation de « double tâche » très préjudiciable aux apprentissages scolaires. En effet, les élèves sont alors totalement concentrés sur leur difficulté à écrire et ne peuvent en même temps écouter ce que dit l’enseignant ou suivre un texte à copier. S’ils sont aussi TDAH (trouble de l’attention avec ou sans hyperactivité), la concentration est déjà difficile. S’ils sont aussi EIP (élèves intellectuellement précoce), ils adorent la perfection sans pouvoir y parvenir ce qui les rend très malheureux…
On ne peut diagnostiquer une dysgraphie avant 7 ou 8 ans, le temps de savoir si l’entrainement à écrire a produit une automatisation de l’écriture ou pas. En général, en CE2, on considère que l’élève s’est assez entraîné pour écrire sans y penser. Le dysgraphique continue, en effet, à dessiner chaque lettre, un peu comme de la calligraphie. Outre que, malgré cela, il n’est pas toujours lisible, il est rapidement douloureux (main, poignet) et fatigué.
Une dysgraphie peut être mise en évidence lors d’un bilan d’ergothérapie, de psychomotricité ou d’orthophoniste. Les deux premiers ne sont pas remboursés par la Sécurité Sociale.
Une seule solution : l’ordinateur !
Sauf qu’il faut apprendre à s’en servir. Il faut apprendre une frappe plus rapide que l’écriture de l’enfant, apprendre à utiliser les logiciels adaptés à chaque handicap et apprendre à ranger tout cela dans l’ordinateur pour retrouver ce qui va bien aussi vite qu’on sort un cahier. Pour cela, des séances d’ergothérapie sont incontournables. Le plus souvent, il faut une séance par semaine pendant plus d’un an, voire deux. Les séances d’ergothérapie sont, en moyenne, à 50 euros de l’heure à Paris et ne sont pas remboursées par la Sécurité Sociale.
Dès le début des séances, il est prudent de commencer à en parler à l’école : « mon fils, entre autres dysgraphique est en cours d’apprentissage de l’ordinateur pour l’école et apportera son ordinateur quand il sera prêt ». En effet, nous constatons des réticences assez vives de certains membres du corps enseignant sur l’introduction de l’ordinateur dans leur école ou dans leur classe. Je me suis interrogée sur ces résistances et me suis dit que, peut-être, cela allait contre la fameuse triade : « vous devez apprendre à vos élèves à lire, écrire et compter. Certes, si on enlève un pied au trépied, il se casse la figure ! Sans doute difficile à remettre en cause… J’ai également interrogé des enseignantes. L’une m’a répondu : « c’est pour garder le pouvoir ! ». Une révolutionnaire, sans doute… Une autre m’a confié que ses collègues avaient peur que leurs élèves jouent avec. Nous les rassurons, l’ordinateur portable pour l’école ne sert que pour le travail scolaire. Toujours est-il que voilà un premier problème à résoudre. Ma tactique est d’en parler longtemps à l’avance, l’idée a ainsi le temps de faire son chemin.
Commencer tôt
Le deuxième souci est qu’il faut commencer très tôt car il n’est pas rare que nos enfants refusent de l’emmener au collège de peur d’être stigmatisés. Certes, ils savent bien qu’ils sont différents mais comme leur handicap est invisible, autant ne pas le dévoiler… Il faut donc qu’ils l’aient utilisé suffisamment longtemps en élémentaire (où les autres élèves peuvent exprimer une certaine envie) pour avoir pu apprécier à quel point cela peut leur être utile pour « suivre » presque comme les autres.
Enfin, les problèmes d’autorisation peuvent être réglés avec un PAP (plan d’aménagement personnalisé) : obtenu lors d’une réunion éducative à l’école avec les bilans effectués et validé par le médecin scolaire. Une ligne du PAP type propose « autoriser l’ordinateur en classe » qu’il faut cocher. Vous devez alors acheter l’ordinateur et les logiciels quand ils sont payants (certains sont gratuits) et payer les séances d’ergothérapie.
Ils peuvent également l’être si vous faites une demande de reconnaissance de handicap auprès de la MDPH. Les notifications peuvent alors prendre en charge une partie des frais liés aux séances d’ergothérapie et vous faire prêter un ordinateur par l’Education Nationale.
Sachez enfin que pour toutes questions liées au handicap, vous pouvez joindre la commission handicap en écrivant à ash@fcpe75.org. Il se trouvera toujours dans le groupe quelqu’un pour vous accompagner dans vos démarches, répondre à vos questions ou vous rencontrer pour partager nos expériences.
Danièle Théléus
Pour en savoir plus sur la dysgraphie et l’ordinateur par le Dr Alain Pouhet, haut spécialiste sur les dys : http://ww2.ac-poitiers.fr/ecoles/IMG/pdf/dysgraphie_et_ordinateur.pdf