Le Conseil supérieur de l’éducation (CSE) rejette la réforme du lycée
Après le rejet des textes sur le bac en mars dernier, les trois arrêtés sur l’organisation du lycée présentés par le ministère ont été repoussés très majoritairement lors du Conseil supérieur de l’éducation (CSE) du 12 avril. L’occasion pour la FCPE de rappeler ses inquiétudes et ses attentes pour la réforme du lycée.
Depuis qu’ils avaient été dévoilés par les syndicats, les futurs horaires du lycée, qui seront appliqués en 2019 en seconde et en 2020 en premières et terminales générales et technologiques, avaient déjà mis tout le monde éducatif en alerte, voire en colère. Ceux-ci annoncent en effet des suppressions de postes, entre 5000 et 7000. S’il est difficile de prévoir précisément le nombre de postes supprimés, il est clair que l’offre scolaire est réduite et qu’il s’agit, portant sur 20 000 divisions pour chaque niveau, de milliers de postes. Et les options sont particulièrement visées.
En seconde générale et technologique par exemple, le futur horaire prévoit 26 heures de cours hebdomadaires alors qu’actuellement une classe de seconde nécessite 28h30. Le différentiel représente environ 2700 postes.
On peut aussi s’interroger sur ce qui reste de l’accompagnement personnalisé (2 h actuellement). En effet il n’a plus d’horaire dédié sauf 54 h annuelles “d’éducation au choix de l’orientation” largement ouvertes aux interventions régionales…
Dans ce contexte, voici la déclaration préliminaire faite par la FCPE lors du CSE du 12 avril :
« Nous avons failli avoir une bonne surprise sur la réforme du lycée. On nous a annoncé des élèves mieux accompagnés, qui construisent librement leur parcours grâce à la suppression des filières, qui se préparent à l’enseignement supérieur…. De belles annonces que nous ne retrouvons pas sur le papier. Nous passons à côté de la réforme dont le lycée a besoin.
Premier constat, la classe de seconde est dénaturée et on ne sait plus trop à qui elle va servir : favoriser la transition collège lycée ou entamer un parcours qui reste en tuyaux d’orgues ? D’ailleurs, nous voudrions rappeler que les élèves qui arrivent en seconde ne sont pas apparus pendant l’été pour venir remplir les bancs du lycée. Ils ont eu avant un parcours au collège, évalué par le socle commun et le brevet. Alors pourquoi remettre un test en seconde, si ce n’est générer plus de stress et accentuer la rupture collège/lycée ?
La disparition des enseignements d’exploration est aussi un recul pour la FCPE ! Certes il y aura des options : mais si c’est comme aujourd’hui, elles ne seront pas accessibles à tous. Comme l’accompagnement personnalisé d’ailleurs, qui n’a plus d’heures dédiées. Nous avons bien vu qu’une partie des heures allaient servir à l’aide à l’orientation. Mais si nous demandions des temps dédiés pour cela, ce n’était pas au détriment d’autres dispositifs. Ce que demandaient les parents, c’était de l’Accompagnement Personnalisé de meilleure qualité, davantage centré sur les besoins des élèves. Mais pas une mise en concurrence entre l’éducation à l’orientation, les options ou les groupes à effectifs réduits ! Nous ne voyons pas comment cette réforme va réduire les inégalités face à la réussite. C’est vrai que les moyens ça ne fait pas tout, mais quand il n’y en a pas, on sait déjà ce que ça donne : des conditions d’apprentissages qui se détériorent et des établissements privés qui font leur beurre sur le dos du public.
Nous avons aussi beaucoup de questions qui restent sans réponses. Une réforme, ce n’est pas du patchwork ! C’est une vision globale sur les évolutions à apporter à notre système éducatif. Quelques exemples : à la FCPE, nous pensons que le tronc commun et les spécialités vont dans le bon sens car ils peuvent permettre de sortir des filières rigides et hiérarchisées. Mais pourquoi s’arrêter en chemin et ne pas développer cette architecture pour la voie technologique ? Et comment s’assurer que tous les élèves sortiront du lycée avec un bagage solide de connaissances et de compétences, nécessaire à la suite de leur parcours, sans aucun échange sur les programmes ? Ou sur les pratiques pédagogiques permettant aux élèves d’apprendre à s’exprimer et argumenter à l’oral ? Nous avons soutenu le principe du grand oral… mais nous ne savons toujours pas comment il sera préparé.
Nous n’avons pas non plus de réponse sur un point essentiel de cette réforme : la liberté effective de construire son parcours. Car si le dernier mot sur le choix des spécialités n’est pas donné à l’élève ou si le nombre de spécialités ou de couplage est restreint dans son lycée : on fait seulement croire aux élèves qu’ils seront acteurs de leur projet d’orientation. C’est un leurre inacceptable pour la FCPE. C’est aux jeunes de choisir leurs enseignements. Dans les lycées, les emplois du temps doivent être construits en conséquence. Les élèves doivent pouvoir suivre des enseignements proposés dans des établissements organisés en réseau, là où c’est possible. C’est d’ailleurs un bon moyen de développer leur mobilité.
Pour faire évoluer le lycée il faut construire cette réforme avec les usagers, à tous les échelons. Il y a bien sûr le dialogue avec le ministère, qui a été insuffisant alors que nous construisons l’avenir de la jeunesse. Mais il y a aussi demain, dans les lycées où il reste encore beaucoup à faire. Les parents comme les élèves doivent être associés aux choix en matière d’utilisation des marges horaires ou sur l’écriture du projet d’établissement. Sur le terrain, les représentants de la FCPE seront présents pour construire un lycée qui participe à la réussite de tous les jeunes et à la formation des citoyens de demain.
[Deuxième partie de la déclaration liminaire lue au moment de la présentation du projet de loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel]
Nous le savons, le monde éducatif a le secret pour faire revivre régulièrement à ses acteurs les mêmes débats de façon cyclique. Le renouvellement des parents d’élèves nous avait jusque-là préservés de ce type d’exercice. Force est de constater à la lecture de ce texte que les cycles se sont accélérés.
Sans surprise donc puisque nous l’avions déjà exprimé ici même à propos de la loi El Khomri, la FCPE reste opposée à l’augmentation de la durée maximale de travail hebdomadaire des apprentis à 40 heures. Ce sont avant d’être des travailleurs, des jeunes en formation.
Sur la question de l’orientation, nous ne pouvons qu’exprimer nos inquiétudes quant au transfert de la compétence d’information aux régions. Quel avenir pour les CIO ? On entend ici où là annoncer leur fermeture.
Quel avenir pour l’ONISEP ? Le transfert des DRONISEP aux régions pose question sur le rôle de l’ONISEP. Quelles seront ses relations avec les instances régionales ? Qui décidera des contenus produits et publiés par ces échelons régionaux ? Qu’est ce qui nous assure que l’information délivrée aux jeunes sera suffisamment diversifiée pour leur garantir l’accès à des informations sur des parcours et des filières de formations qui ne seraient pas nécessairement présents dans la région ?
Au moment où nous voyons enfin arriver une enveloppe horaire dédiée à l’orientation des lycées, ces dispositions offrent un signal contradictoire ».
Voici infra (document PDF) les positions défendues en séance par la FCPE :