Le maître est l’enfant : le documentaire sur la pédagogie Montessori
Le maître est l’enfant d’Alexandre Mourot, actuellement dans les salles, est un film documentaire sur la pédagogie Montessori. Elodie Gabriel, adhérente FCPE du conseil local Mouffetard-Epée de Bois, qui avait eu la chance de le voir en avant-première, vous en parle !
Au mois de mai, j’ai eu l’opportunité d’assister en avant-première au film “Le maître est l’enfant” (sans faute d’orthographe !), un documentaire sur la pédagogie Montessori. J’ai été à la fois chamboulée et enchantée par cette œuvre dont je vous livre ici quelques éléments.
Le réalisateur est, comme nous, un parent qui s’est posé des questions sur les processus d’apprentissages de sa fille. Convaincu que l’enfant porte en lui ses propres potentialités à se développer, il a passé un an dans une classe Montessori accueillant des enfants d’âges mélangés (3 à 6 ans).
La force de ce film est de laisser la part belle aux images, sans trop de commentaires. Ainsi, tout comme l’enseignant, le spectateur prend le temps d’observer les enfants et repère les processus d’apprentissage à l’œuvre chez chaque élève et la dynamique qui s’opère en lui.
Dans une première partie, les images sont centrées sur les élèves qui semblent découvrir seuls, par eux-mêmes, les lettres, les chiffres, la géographie ou encore les lois de la physique. La durée d’une activité est déterminée par l’enfant : c’est lui qui choisit son matériel, s’installe, puis range à la fin. Des espaces de repos sont aménagés pour les moments de fatigue. Il y a même un atelier de découpe de fruits pour les petites faims. Ainsi, les enfants sont respectés dans leurs capacités d’attention, inévitablement variables d’un élève à l’autre. L’enfant non seulement apprend, mais il éprouve aussi la jouissance de la découverte, comme on imagine Newton prenant conscience de la gravité en regardant tomber sa pomme. Ainsi, l’élève accroît ses connaissances et compétences, mais aussi sa confiance en lui, ce qui relance perpétuellement sa curiosité.
L’ambiance est calme, les enfants sont encouragés à ne pas faire trop de bruit pour ne pas gêner les autres, et les règles sont plus souvent rappelées par les enfants eux-mêmes que par l’adulte. La plupart du temps, ce sont les élèves les plus grands qui expliquent les règles aux plus jeunes, et qui les accompagnent pour les activités les plus difficiles. Ce système de tutorat responsabilise les enfants dès le plus jeune âge et les encourage à respecter les règles du vivre-ensemble puisque chacun est un modèle pour les autres.
Après cette première partie, le réalisateur élargit le champ et l’enseignant apparaît. On le voit préparer sa classe avec soin, disposer le matériel à hauteur d’enfant, avant d’accueillir ses élèves avec bienveillance. Les enfants n’attendent rien de lui, et investissent chacun leur activité. L’instituteur les observe. Selon ce qu’il détecte chez chacun, il va proposer une nouvelle tâche, une variation avec un matériel, puis reprend son poste d’observation et laisse l’enfant expérimenter par lui-même. On observe alors un jeune garçon de 4 ans, qui semblait jusque là un peu déconcerté, apprendre à lire en quelques semaines, parce que l’enseignant a su repérer chez lui l’intérêt pour les lettres, l’orienter et le faire grandir en l’aiguillant vers les activités les mieux adaptées pour lui à ce moment.
Ce n’est pas parce que les activités pédagogiques sont ludiques et menées entièrement par l’enfant que celles-ci sont confondues avec du jeu : lorsqu’un élève détourne un matériel d’apprentissage pour développer son imaginaire, on lui rappelle qu’il pourra jouer durant la récréation. Le travail est considéré avec un grand sérieux, et les enfants ne s’y trompent pas : ils différencient bien les activités scolaires des moments de détente et de jeu.
Au-delà des techniques proprement spécifiques à la pédagogie Montessori, ce qui ressort de ce film est le respect et la bienveillance dont le maître fait preuve envers l’enfant et ses compétences, et comment celui-ci s’en saisit pour grandir. Et si le matériel est coûteux, et que ce dispositif nécessite des locaux plus grands que les classes parisiennes, le ratio adulte-enfants est plus faible que dans l’enseignement public : la norme en pédagogie Montessori est d’1 enseignant pour 40 élèves. Il est donc fallacieux de brandir l’argument économique pour ne pas développer cette approche.
Cependant, on peut se poser la question du retour de ces élèves dans un système d’enseignement plus classique (lors d’un déménagement, ou tout simplement au passage au collège). Les tenants de Montessori affirment que les enfants ont si bien développé leurs apprentissages et leur confiance en eux qu’ils ont de meilleures capacités à s’adapter à tout autre type de pédagogie. On peut toutefois s’interroger sur la brutalité, pour l’élève, à se retrouver soudainement plongé dans un système éducatif ordinaire.
Par ailleurs, lorsqu’on constate que, vu le peu de places dans les écoles Montessori – et leur coût –, celles-ci accueillent essentiellement des enfants de parents aisés et sensibilisés aux pédagogies actives, on peut se demander ce que cette approche apporterait à des enfants en difficulté, ou dont les familles ne relaieraient pas, au domicile, les mêmes approches.
En France, si les classes Montessori sont exclusivement dans l’enseignement privé, l’Education Nationale permet aux enseignants de s’inspirer de cette pédagogie. Pour preuve, une jeune association les aide à intégrer des éléments de la démarche montessorienne dans leurs pratiques quotidiennes (http://www.public-montessori.fr).
Sans pour autant transformer toutes les écoles en « Maisons des enfants Montessori », nous pouvons cependant chacun, à notre niveau, nous inspirer de ces valeurs et faire confiance à nos enfants : si nous prenons le temps de les observer, nous pourrons voir chez eux cette capacité à apprendre et à grandir.
Convaincue que vous serez comme moi transformés par ce documentaire, je vous encourage à aller découvrir ces images par vous-même, pour que les idées de Maria Montessori, qui sont déjà centenaires, continuent à vivre, pour le plus grand bien de nos chères têtes blondes.
Elodie GABRIEL – CL Mouffetard-Epée de Bois – UL 5-6