“L’école à la maison” : quel bilan tirer du confinement à Paris ?

Bien que Paris demeure un département « rouge », les élèves du premier degré ont repris le chemin de l’école. Pour les collèges, il faudra attendre la semaine prochaine qu’une décision soit prise. Si on sait que les lycées ne reprendront pas les cours en présentiel, la plus grande incertitude règne sur la tenue des oraux de français en première, les modalités de notation pour le bac et les concours des grandes écoles et en médecine.
« L’école à la maison », ce n’est pas terminé, car peu d’élèves pourront effectivement retourner dans leur établissement. Ce début de dé-confinement est cependant l’occasion pour nous d’en tirer un premier bilan. Nous avons obtenu un nombre similaire de réponses dans le premier et le second degré.
Premiers éléments de bilan
A l’image de ce dé-confinement aux modalités multiples, la FCPE Paris constate, suite au sondage adressé à ses adhérents, que le ressenti des modalités d’information aux parents, d’organisation du travail à la maison, de la fracture numérique et du contenu pédagogique est contrasté en fonction des niveaux scolaires. Les parents des établissements du premier degré (maternelles, polyvalent et élémentaires confondus) ont été prévenus par des moyens plus directs (affiche, mot dans le carnet). L’espace numérique de travail (ENT) a été le média le plus utilisés dans le secondaire. Quel que soit le type d’établissement, le mail a été largement utilisé, soulignant l’importance de la constitution de fichiers exploitables dès la rentrée.
L’annonce de la fermeture pour les établissements du1er degré a majoritairement été faite via une affiche devant l’école (68,33%), un mot dans le cahier de correspondance ou un mail envoyé par la direction. Dès le début du confinement l’organisation du travail a été indiquée aux familles (50%) et le travail communiqué essentiellement par mail par les enseignants ou par l’intermédiaire du blog de l’école. En parallèle, les parents ont beaucoup communiqué entre eux, majoritairement grâce aux mails à 65% ou WhatsApp.
Pour les établissements du 2nd degré le cordon ombilical est clairement l’ENT. C’est encore plus marqué au collège où les parents ont été informé à 87% via l’ENT, les parents du lycée ont un peu moins reçu l’info via l’ENT (80%), en relation avec l’autonomisation des élèves. Les parents du secondaire ont donc été globalement correctement informés de la fermeture des établissements, mais seulement 42% des parents ont été informés des modalités d’organisation en collège, et 23% en lycée ! Il faut souligner que la très grande majorité des parents du secondaire déplorent le manque de coordination des équipes enseignantes et la grande diversité dans les modalités de cours à distance et suivi des élèves.
La majeure partie des CL ont pu faire un point avec la direction lors du confinement (environ 60% dans le premier degré, 75% dans les collèges et 50% dans le lycée) mais il faut noter que de nombreuses directions n’ont pas établi de contacts, et leur non-adhésion au principe de coéducation dans l’école peut poser un problème dans le contexte de « l’école à la maison », qui suppose une interaction forte entre enseignants, direction et parents.
Enfants des personnels soignants
Des différences inter-degré sont marquées dans l’accueil des enfants de personnels soignants :
- L’information sur l’accueil des enfants du personnel soignant a été beaucoup plus large dans le premier degré (58% des CL informés) que dans les collèges (29%) et les lycées (13%).
- Cependant, 13,33% des réponses apportées au sondage montrent que certaines écoles ont établi des restrictions à l’accueil des élèves pendant le confinement (2 parents soignants imposés ou accueil des élèves jusque 16H…).
- Environ 8% des établissements indiquent des soucis pour initialement accueillir des enfants dont un seul parent est soignant et plus de la moitié des CL ignorait en début de confinement les modalités de repas des enfants accueillis. Dans la majorité des cas une restauration a été proposée aux élèves accueillis (suivant les écoles en repas chaud ou froid)
Lutter contre le décrochage scolaire
Pour lutter contre le décrochage scolaire l’utilisation de l’ENT est très avancée dans le secondaire mais peu répandu dans le premier degré (85% environ contre 17% environ). L’ENT a permis de définir les modalités de la continuité pédagogique (mode d’emploi de l’ENT, où trouver le travail à faire, où déposer sa copie, etc…).
Environ la moitié des établissements du secondaires ont informé les parents sur un suivi des enfants peu connectés, mais ces données ne sont majoritairement pas communiquées aux CL. Ce sont les lycées qui ont le moins communiqué sur la manière dont les enseignements vont se faire, sur quel support, à quelle fréquence et sur la coordination de l’équipe enseignante sur les supports choisis.
La fracture numérique : une réalité
Selon 26,7% des réponses, le recensement des élèves sans matériel informatique a été fait dans les écoles et des solutions ont été mises en place (appels téléphoniques des enseignants à 41,67%, devoirs photocopiés à 40%). Si de nombreuses pratiques originales via l’informatique ont été répertoriées, celles-ci posent le problème des familles éloignées du numérique.
De nombreuses directions ont recensé les enfants qui ne sont pas équipés d’ordinateurs ou ne pouvant travailler à distance, mais il est difficile d’obtenir des données. C’est au collège que ce recensement a été le plus été communiqué (dans 55% des établissements), mais le taux reste fort au lycée (45%), et plus faible dans le premier degré (27%). Ces différences peuvent s’expliquer par la possibilité de prêt de matériel par les établissements, plus développé au collège qu’au lycée. Dans le premier degré et au collège, la distribution de supports physiques et des appels téléphonique des enseignants pour communiquer le travail à faire et garder le contact sont non négligeables.
Vigilance sur les enseignements
La nature du contenu pédagogique de « l’école à la maison » a été un grand sujet de vigilance pour la FCPE. Dans le premier degré, 58% du travail a essentiellement porté sur des approfondissements. 30% des CL de collège indiquent que les élèves ont bénéficié d’approfondissement. Au collège et lycée, respectivement 79 % et 74% des CL indiquent que les cours ont portés sur des nouveaux apprentissages, ce taux tombe à 39% en primaire. Mis en perspective avec la fracture numérique, ces nouveaux apprentissages seront difficilement rattrapables par les élèves peu connectés, et la FCPE 75 demande au rectorat des mesures de remédiations à ce hiatus, après un bilan pour chaque établissement. A mi-parcours de la période de confinement, les réponses indiquent à 51,67% que les dispositifs mis en place sont adaptés à la continuité pédagogique avec un réel suivi du programme, même si celui-ci est en « mode allégé ». Le travail donné est essentiellement basé sur des révisions (58,33%), mais certains parents relèvent de nouveaux apprentissages (38,33%). Ici encore se pose le problème des familles et des professeurs éloignés du numérique.
Des évaluations ont eu lieu durant cette période, mais seules 3,33% d’entre elles ont été notées en primaire. De la même façon, nous demandons un bilan des évaluations qui ont été organisées et notées (dans 71% des collèges, 58% des lycées) afin de vérifier que ces notes ne seront pas prises en comptes, au risque de léser les élèves souffrant de fracture numérique.
Communication entre parents
Les CL ont utilisé différents médias pour communiquer avec les parents, mais les deux qui se distinguent sont les mails et le réseau Whatsap. Les résultats sont homogènes quel que soit le type d’établissement.
Ce bilan de la période de confinement est riche en enseignements, et montre l’importance d’établir des modalités de communication claires entre les établissements et les parents. Le suivi de la période de dé confinement sera important pour établir si l’accueil des élèves a permis de réduire les séquelles de la fracture numérique pendant la période de confinement. Il doit aussi permettre d’aider à mettre en place les mesures qui permettrons une reprise de la continuité pédagogique à la rentrée de septembre, et d’inclure les parents à la réflexion dans un cadre de coéducations pour réfléchir aux mesures d’organisation, méthodes d’enseignement à distance afin de parvenir dès septembre à une rescolarisation et une reprise des élèves pour la consolidation des savoirs, et sur des nouveaux acquis (programme du troisième trimestre 2020 et année en cours) .
Bonnes pratiques partagées :
- Appel une fois par semaine à chaque élève
- Vidéo de l’enseignant pour encourager les élèves
- Vidéo des profs de sports
- Organisation de classe en visio conférence
- Elèves se retrouvant en fin de journée en visio conférence. L’enseignant les rejoint une fois par semaine
- Partage de dessins et poésies par tous les élèves d’une classe
- Permanence téléphonique organisée par l’école pour impression des devoirs ou fourniture de matériel en cas de besoin
- Envoi de dictées et lectures audio
- Envoi de livres scannés pour continuer le parcours littéraire.
- Organisation de groupes de discussion d’élèves dans le secondaire