Parcoursup à Paris : la grande nébuleuse
Trois administrateurs de la FCPE Paris ont participé lundi 28 mai à une rencontre organisée par le Service académique de l’information et de l’orientation (SAIO) avec les fédérations de parents d’élèves. Une semaine après la communication aux candidats des premiers résultats, cette réunion aurait du être l’occasion de faire un premier bilan concret de la mise en oeuvre de Parcoursup dans notre Académie. Malheureusement aucun indicateur chiffré ne semblait disponible… hormis ceux que révélait l’échantillon d’expériences recueilli par le sondage de la FCPE Paris dans les jours précédents. L’échange a donc porté sur des aspects qualitatifs. Nous vous en livrons les éléments les plus significatifs.
Classement des candidatures, quotas de candidats boursiers et de candidats extérieurs à l’académie
Pour chaque formation, un pourcentage défini de propositions est fait aux candidats dits extérieurs, c’est-à-dire domiciliés dans d’autres secteurs académiques que celui de Paris. Chacun de ces taux a été décidé par le recteur après consultation auprès de la direction de l’établissement qui dispense cette formation. Ces taux ont été prudents : ni totalement dissuasifs, ni outrancièrement incitatifs à un tropisme vers Paris. Le taux de candidats extérieurs pour une formation donnée ne semble pas être visible dans Parcoursup. L’ensemble de ces taux a fait l’objet d’un arrêté du recteur : il est donc en théorie du domaine public, et le SAIO va s’efforcer d’en communiquer les références aux parents d’élèves. Pour les facultés de droit, le taux de propositions aux candidats extérieurs est de l’ordre de 15%; pour l’Inalco, plusieurs taux ont été fixés, en fonction des langues concernées.
Un taux de candidats boursiers par formation a été fixé par un processus analogue. Le taux de candidats boursiers pour une formation donnée est consultable sur la fiche Parcoursup de cette formation, dans l’onglet “Contexte et chiffres”.
Chaque établissement a établi un classement des candidats selon une démarche décidée par l’établissement, en toute liberté académique. Ce classement initial ne doit pas tenir compte du secteur académique de rattachement du candidat ni de son éventuelle qualification de boursier. La liste ainsi classée a été communiquée à l’Académie, qui y a fait les modifications nécessaires pour prendre en compte les quotas boursier et hors-secteur. Par exemple, pour un taux hors-secteur de 10%, il sera fait en sorte que chaque tranche de 10 candidats consécutifs comporte un hors-secteur. Le classement final ainsi obtenu, qui peut donc être plus ou moins différent du classement proposé par l’établissement, lui est communiqué. Les changements sont d’autant plus marqués que le nombre de candidats est réduit : le classement initial d’un BTS sera plus modifié que celui d’une licence très demandée. Une fois la liste ainsi reclassée, les quotas ne sont plus utilisés : seules les sorties de liste d’attente (par acceptation d’une autre proposition, abandon ou démission de candidats individuels) feront progresser les candidats en attente.
Redoublants
Plusieurs sources ont indiqué que le dossier de chaque candidat, visible dans les établissements d’enseignement supérieur, comporte un ensemble de “marqueurs dossier”, indiquant notamment si ce candidat a changé de série en cours de scolarité dans le secondaire (“C”), a redoublé au moins une fois en première (“P”) ou en terminale (“T”). Le SAIO nous assure qu’à sa connaissance ces indicateurs ne sont pas pris en compte par ces établissements auxquels ils sont pourtant destinés. Ils seraient donc essentiellement décoratifs ?
Différences de notation entre lycées
La notation chiffrée pour un niveau de compétence et de résultat donné varie de lycée en lycée. Parcoursup impose aux établissements supérieurs de classer tous les candidats à chaque formation, et bien que les algorithmes locaux de classement n’aient à ce jour pas été publiés, au nom de la liberté académique, il ne fait guère de doute que la très grande majorité de ces algorithmes reposent exclusivement ou très majoritairement sur ces notes. La disparité des notations entre les lycées joue donc directement sur le rang auquel un candidat figurera dans les files d’attente, ou sur sa probabilité de recevoir une proposition dans une formation sélective. Aux yeux des services de l’Académie, cependant, cette disparité ne devrait pas poser plus de problèmes que dans le passé. Aucun mécanisme de péréquation n’est donc proposé. Rien n’est pire ? Mais rien n’est clair !
Erreurs dans les fiches avenir
Aucune erreur massive, aucun défaut de saisie par classe entière ou par matière n’a été signalée par les lycées ni par les parents. Il est rappelé que les lycées doivent avoir en mars prié les parents de vérifier la partie visible de la fiche Avenir, dont les notes des bulletins. Si les parents constatent maintenant des erreurs massives de saisie, ils restent libre d’en informer le SAIO, mais les classements locaux ont été établis sur la base des éléments saisis, et il est maintenant trop tard pour les changer.
PACES
La ministre de l’enseignement supérieur a assuré au public que tous les candidats à la première année commune des études de santé (PACES) auraient effectivement une proposition en PACES à la rentrée au plus tard. L’Académie de Paris n’est toutefois pas actuellement en mesure de garantir que les candidats parisiens auront une proposition dans l’Académie de Paris.
Commission rectorale et phase complémentaire
Le 26 juin s’ouvrira la phase complémentaire, qui va permettre aux candidats sans proposition de consulter les places encore vacantes, et d’y postuler.
Une commission sous la direction du recteur examinera les cas les plus difficiles, après le 26 juin. Les candidats n’ayant reçu que des réponses négatives (donc en filières sélectives) peuvent d’ores et déjà y faire appel. La composition de cette commission n’a pas été évoquée, ni ses modalités de réunion ou de décision.
Aide dans l’utilisation de l’outil, demande d’aide en cas d’erreur
Les candidats rencontrant des difficultés peuvent avoir recours au support en ligne. Quatre personnes y sont affectées au SAIO de Paris. La consigne ? Préférer la messagerie intégrée à l’outil Parcoursup, plutôt qu’un appel téléphonique. Le sondage FCPE montre que la hotline est appréciée des utilisateurs, même cela ne compense en rien le stress très lourd résultant du processus.
plusieurs propositions : que faire?
Pour chaque proposition reçue, le candidat a 7 jours (dans cette phase-ci) pour répondre à partir de la notification. À un moment donné, on ne peut avoir qu’une proposition acceptée, mais on peut avoir plusieurs propositions en cours de réflexion. Cela apparaît clairement sur l’interface présentée au candidat.
Points divers
Le calendrier des délais de réponse est en ligne (ici).
Le taux d’acceptation en CPGE dans les lycées Henri IV et Louis le Grand est semblable à celui des années précédentes.
Le tableau de bord national porte sur tous les candidats: lycéens en terminales, mais aussi étudiants en réorientation, et autres demandeurs de formation.
Prochaine étape
Les parents demandent au SAIO de leur communiquer un tableau de bord chiffré. Un nouveau point d’étape doit pouvoir être fait dans deux semaines, début de la phase de suspension pour le passage du bac. À cette date, les résultats des concours des grandes écoles de commerce hors Parcoursup seront connus et les futurs étudiants devront avoir démissionné de Parcoursup pour s’inscrire dans ces écoles.
“Zones de difficultés”
La direction de l’Académie, contactée par la FCPE Paris, identifiait en fin de semaine dernière plusieurs “zones de difficulté” : les lycées professionnels et l’accès aux BTS ; les dossiers ne comportant que des choix sélectifs ; la gestion de la libération des places et la “hauteur du surbooking”.
La FCPE Paris s’est étonnée de l’absence de chiffres précis donnés aux fédérations de parents alors que nationalement ils sont affichés et a renouvelé sa demande de les voir communiqués dans les meilleurs délais.
Pour l’Académie, le système Parcoursup permet d’intervenir plus tôt avant l’été sur les dossiers difficiles, par rapport à l’ancien APB. Concrètement, cela se passe à deux niveaux : une commission académique régionale (plutôt pour le champ universitaire) et un groupe technique académique qui se réunit depuis le 28 mai sur les cas sans solution.
Questionnée sur les dossiers des élèves en situation de handicap, l’Académie identifie à ce jour très peu de dossiers remontés qui feront l’objet d’un traitement individualisé au-delà de Parcousup.
Pour la FCPE, mobilisée depuis des mois, les zones de difficulté ne s’arrêtent pas là et concernent des registres très divers, de l’opérationnel au très politique.
Plusieurs remontées de lycéens parisiens et parents FCPE qui ont vécu la même mésaventure au moment de la validation des vœux : tous leurs dossiers en attente écrasés parce que les lycéens ont utilisé l’application mobile et non pas le site. Quand on connait les usages des jeunes, ce nouveau râté de Parcousup est presque criminel. Les consignes rapidement données ne suffisent pas (les élèves ont dû en théorie être alertés par leur établissement que l’appli mobile c’est pour consulter et pas pour valider même si les boutons existent…). La seule solution consiste in fine à appeler immédiatement le rectorat, déjà bien débordé.
Sur un terrain plus politique — autrement dit sur les choix d’orientations de politiques éducative et universitaire — la FCPE a pris connaissance avec beaucoup d’inquiétude des taux de boursiers fixés par les recteurs pour les différentes licences de droit d’Ile-de-France. 2% à Paris 1 Panthéon-Sorbonne et Paris 2 Panthéon-Assas mais 16% à Paris 8 Saint-Denis et 18% à Paris 13 Villetaneuse-Bobigny. Des chiffres qui en disent long sur cette lame de fond dénoncée par notre fédération depuis plusieurs mois : la distinction scolaire/universitaire qui confine bel et bien à de la ségrégation. Comme pour Afflenet, la FCPE Paris regrette que l’étiquette “boursier” puisse à nouveau jouer à plein comme repoussoir. La discrimination commence quand on stigmatise et met en place des barrières : c’est clairement le cas cette année où l’on acte des facs de droit à la noblesse sociale préservée au coeur de Paris. Comme pour ne pas mélanger “premiers de cordée” et boursiers.