Pour un enseignement professionnel de qualité pour nos enfants
Voici la tribune de la FCPE Paris publiée le 8 novembre sur le site du journal Le Monde.
Les liens vers les pétitions en ligne sont à la fin de l’article.
Le gouvernement a fait l’annonce d’une grande réforme de la voie pro, mais il en oublie l’essentiel : assurer une formation qualifiante complète, validée par un diplôme national accessible à tous les jeunes et reconnu par tous. Ce projet est aujourd’hui doublé à Paris de l’intention de la région Île de France de fermer sept lycées, dont six professionnels.
Dans un contexte où la revalorisation de la voie professionnelle est indispensable, tant au niveau de son image que des moyens dévolus aux formations, les annonces gouvernementales nous laissent hélas entrevoir une forte dégradation de son offre éducative : diminution du socle commun de connaissance au profit des stages professionnels, suppression des diplômes nationaux, diminution de l’offre d’enseignement en voie professionnelle dans les établissements publics …
L’enseignement professionnel est depuis longtemps malmené par les acteurs du monde éducatif, et souvent vécu comme une orientation subie par les familles. En 2022, ce sont pourtant plus de 20% des élèves Parisiens qui ont été orientés en pro à l’issue de la troisième, un chiffre en hausse par rapport aux années précédentes.[1] Alors que certains jeunes rêvent de se former au métier de leur choix en intégrant un lycée professionnel, de nombreux autres s’y retrouvent affectés par défaut, ressentant cette orientation non désirée comme la marque d’un échec scolaire. Les équipes pédagogiques et de direction brandissent parfois la voie professionnelle comme un repoussoir pour les élèves les moins performants scolairement, en dépit de la richesse de l’offre de formations ouvrant la porte vers des métiers passionnants avec des perspectives de carrière.
L’allongement de moitié des périodes de stage en entreprise ne trompe pas sur la volonté de l’État de faire des économies dans les dépenses d’Éducation. Cela revient à couper une grande partie du socle commun de connaissance et des savoirs fondamentaux dispensés par les enseignants. Si les périodes de formation en entreprise sont essentielles aux cursus professionnels, ces élèves, salariés de demain, se verront privés de bases générales solides pour évoluer et s’adapter dans un monde économique en constante mutation. Se pose également la question de l’encadrement de ces jeunes : qui suivra leur formation et validera leurs acquis ? Quel sera le statut des enseignants qui ne seront chargés de cours que sur une partie de l’année ? Et que dire de la possibilité pour les élèves de poursuivre des études supérieures, si on ne leur en donne pas les moyens éducatifs ?
En envisageant de supprimer des diplômes nationaux garantis par l’État, qui assuraient aux élèves une qualification large et solide, au profit de diplômes locaux sur un spectre étroit de compétences, le gouvernement ne répond qu’à des objectifs de court terme, fondés sur les besoins immédiats des entreprises d’un bassin d’emploi. Toutes les entreprises françaises ne sont pas structurées pour faire progresser massivement les salariés dans leur filière. La performance des élèves de la voie professionnelle ne peut se résumer par le seul taux d’insertion professionnelle, ni ne dépendre que du manque d’emplois dans les bassins de recrutement. Ces élèves ne doivent pas devenir une main d’œuvre bon marché visant à satisfaire les besoins ponctuels du secteur privé, sans bénéficier de perspectives à moyen et long terme !
Pour compléter ce tableau désastreux, la région Ile de France décide maintenant de fermer plusieurs lycées professionnels : quelle continuité scolaire offre-t-elle ainsi aux élèves de ces établissements, particulièrement pour ceux en seconde et en première cette année ? Comment ces jeunes pourront-ils être formés dans les meilleures conditions, sachant la complexité d’installer des plateaux techniques nécessaires à certaines formations ? Quelle est l’adéquation de ces mesures à la pénurie de places observée dans certaines filières ?
La FCPE Paris s’oppose à la réforme de la voie professionnelle menée dans ces conditions, selon un calendrier précipité et en l’absence de concertation de la communauté éducative. Nous demandons que tous les élèves de ces filières puissent acquérir un socle de connaissance solide, à l’instar de leurs camarades des voies générales et technologiques, dispensé par des enseignants pédagogues dûment formés, pendant un volume horaire suffisant, et dans des locaux adaptés. Les lycées professionnels parisiens doivent être maintenus, et offrir des formations de qualité. Les stages en entreprise doivent être mieux encadrés, afin de garantir la formation et la sécurité des jeunes, avec des rémunérations à hauteur du travail effectué.
Le bac professionnel doit rester un diplôme national, indépendant du bassin de recrutement local, gage de qualité et d’égalité pour tous les élèves. Parce que nos enfants ne sont pas de la chair à patrons, donnons-leur les moyens de devenir des adultes éclairés et épanouis dans leur profession !
[1] L’essentiel de l’orientation et de l’affectation pré-bac, Service académique d’information et d’orientation (SAIO), Académie de Paris, 2022
Liens vers les pétitions en ligne :
Non à la fermeture du lycée Brassaï (Paris 15e)
Non à la fermeture du lycée Elisa Lemonnier (Paris 12e)