Rapport Mathiot : une réforme du lycée qui oublie une bonne partie des élèves !
Jean-Michel Blanquer avait confié une mission de réflexion sur l’avenir du baccalauréat à une équipe conduite par Pierre Mathiot, ancien directeur de l’institut d’études politiques (IEP) de Lille. À l’issue des consultations menées, Pierre Mathiot a remis le 24 janvier 2018 son rapport “Un nouveau baccalauréat pour construire le lycée des possibles”. L’occasion pour la FCPE de rappeler ses priorités et sa vision de l’indispensable réforme du lycée qu’elle appelle de ses vœux depuis des années.
Alors qu’il est très largement annoncé que le baccalauréat va être réformé, la FCPE rappelle qu’il ne s’agit en réalité que d’une réforme du bac général et technologique. Un tiers des élèves, inscrits au baccalauréat professionnel, semblent donc absents des travaux du ministère sur le baccalauréat. Une mission est aussi en cours sur l’enseignement professionnel, mais pour la FCPE, les trois voies du lycée doivent évoluer ensemble, malgré leur spécificité.
Ce choix du ministère de séparer les travaux et les réformes sur les voies du lycée marque un renoncement à l’ambition d’un lycée pour tous, où quelle que soit la spécialisation choisie, les élèves apprennent ensemble, vers un même objectif : apprendre et se préparer pour la suite de leur parcours, qu’ils aboutissent à une insertion professionnelle rapide ou une poursuite d’études. C’est aussi une condition pour rendre effective la formation tout au long de la vie.
La FCPE est favorable à la réduction des épreuves du baccalauréat, aujourd’hui source de stress et de bachotage, car vécues comme une sanction plus ou moins juste de ce que l’élève a retenu de ces trois ans au lycée. La priorité doit être de mieux former les élèves et pour cela, évaluer l’ensemble des connaissances et compétences développées, ce qui ne peut pas être fait sur un seul examen terminal. L’évaluation progressive des élèves est donc nécessaire, mais pas à travers les moyennes des moyennes des notes – piste proposée par le rapport Mathiot –, mais bien en mettant en place des exercices certificatifs réguliers sur les enseignements des élèves. Ces derniers pourront être de l’oral, des exposés, du contrôle en cours de formation, des devoirs sur table ou outils numériques… et devront être intégrés au parcours de l’élève, pour ne pas recréer l’usine à gaz qu’est le bac aujourd’hui. Enfin, la FCPE rappelle que le baccalauréat doit rester un examen national, elle s’opposera à un baccalauréat par lycée. Les mini-épreuves qu’elle demande devront être cadrées nationalement.
L’objectif de la réforme doit aussi être la réduction des inégalités face à la réussite. Adapter les pédagogies aux besoins des élèves, accompagner chacun dans son projet et ses apprentissages, développer des compétences variées comme l’oral ou les travaux en groupe sont les exigences que porte la FCPE sur le lycée. Le grand oral envisagé comme une des épreuves terminales peut aller dans ce sens, mais à condition que les élèves y soient effectivement préparés et que l’approche interdisciplinaire soit développée au lycée. Sinon, il y aura d’un côté, ceux qui pourront s’y préparer grâce à de l’aide à la maison ou par des cours privés payés par les parents, et les autres. Savoir s’exprimer à l’oral est nécessaire dans le monde d’aujourd’hui, tous les élèves doivent y être entraînés.
Remplacer les filières S, L et ES de la voie générale et technologique par des parcours ne simplifiera rien et ne résoudra pas le problème de fond que la FCPE dénonce depuis longtemps sur le lycée : la hiérarchie et le cloisonnement des filières. Cette organisation du lycée aboutit aujourd’hui à des orientations subies, car les élèves vont là où leurs notes le leur permettent, mais non vers ce qu’ils ont envie d’apprendre. Trop d’élèves suivent la filière S, car elle apparaît comme plus prestigieuse et moins bloquante pour la suite du parcours. Il faut sortir d’une logique de « profil » (scientifique, littéraire…) qui enferme les élèves pour leur donner la possibilité de construire leur parcours. Ainsi, les enseignements devraient être organisés autour d’un tronc commun pour les trois voies du lycée et complétés par des enseignements de spécialisation choisie par les élèves.
Enfin, la FCPE s’opposera à un projet qui ferait du lycée, un lieu de pré-orientation de l’enseignement supérieur. Si ce que les élèves apprennent au lycée doit être un appui pour qu’ils construisent leur projet post bac, notamment parce qu’ils y approfondissent leur centre d’intérêt, l’accès à la filière de leur choix dans le supérieur doit rester la règle, quel que soit le parcours réalisé par l’élève au lycée. La FCPE reste mobilisée contre la sélection à l’entrée de l’université et l’utilisation des attendus à cette fin.
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