Tribune pour Kaci, parent d’élève à Paris expulsé de force vers l’Algérie jeudi 20 juin 2019

Samedi 22 juin, en ouverture du 72e Congrès départemental de la FCPE Paris, une “Tribune pour Kaci” a été prononcée par Isabelle Rocca, présidente, qui a tenu à dédier l’édition 2019 du congrès des parents d’élèves parisiens à Kaci Guermah, parent d’élève et militant associatif du 14e arrondissement de Paris, expulsé de force jeudi 20 juin vers l’Algérie.
En présence de sa famille, les élus du 14e, son avocat, RESF, la directrice de l’école où son fils est scolarisé, les syndicats enseignants, ont également et unanimement témoigné de leur indignation absolue et surtout de leur détermination à poursuivre leur mobilisation pour faire respecter les droits de Kaci Guermah et surtout le “droit à la famille” de son fils Aksim et de sa fille Mighissa âgée de 18 mois et née en France. La France aurait-elle officiellement renoncé en 2019 à respecter la Déclaration des droits de l’enfant adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies en 1959 ?
Tribune pour Kaci
Jeudi matin, 20 juin 2019, pendant que son fils Aksim était assis dans sa salle de classe de CE2 à quelques mètres d’ici, dans l’école Maurice D’Ocagne, Kaci Guermah était expulsé de France, forcé à monter dans un avion pour Alger. Kaci Guermah a été menotté, et ses pieds liés. Pour qu’il arrête de crier, les policiers lui ont appuyé sur la carotide avant de lui mettre un casque de force.
Qui est Kaci ? Pourquoi notre colère et notre indignation sont immenses ce matin et depuis jeudi ? Kaci est ce parent d’élève du 14e, ce militant associatif du 14e parfaitement intégré qui n’attendait que son rendez-vous fixé au 5 juillet pour déposer son dossier de régularisation, dossier qui avait toutes les chances d’aboutir. Kaci c’est ce papa pour lequel nous nous battons depuis des semaines, avec toute la communauté éducative de son école, avec vous parents FCPE de tout Paris, avec les élus parisiens à tous les étages, avec les associations nombreuses, RESF, la LDH. Kaci c’est ce père de famille qui avait pu le 7 juin dernier refuser un premier vol pour Alger. Ses proches avaient alors retrouvé l’espoir de le voir rester en France. Comme nous tous, parents, enseignants, élus, associations, amis. Même si déjà le silence du ministère de l’Intérieur nous inquiétait…
Mais avant-hier jeudi, en cette « Journée mondiale des réfugiés », la République a mis Kaci à la porte. Cette décision absurde d’expulsion, ce n’est même plus la République qui marche sur la tête, c’est la République qui recule. Et avec elle, les Droits de l’Homme et les libertés.
Kaci, c’est un bouc émissaire de plus. C’est l’inacceptable « dégât collatéral » de la nouvelle politique migratoire d’un gouvernement qui sur cette question marche sans complexe dans les pas de l’extrême-droite. Kaci vient de vivre le sort de milliers d’étrangers en situation irrégulière, ces « sans papiers » qui en dépit de leurs attaches sur le territoire, de leur intégration, de leur contribution à l’économie française, ne peuvent obtenir de titre de séjour. En plus de l’incertitude dans laquelle ils sont contraints de vivre, ces personnes peinent à exercer les droits dont ils disposent : accès à l’éducation, à la santé, au logement, au travail.
Nos enfants apprennent en classe les valeurs de la République, ils ont des parcours d’éducation à la citoyenneté. On leur enseigne la fraternité, la solidarité. On leur enseigne en fait un savoir abstrait sur ce que pourrait être la France, cette France qui refuse « en même temps » à l’Aquarius d’accoster. Cette France qui multiplie les Kaci, cherche à les faire taire et à les rendre invisibles. En tant qu’adhérents de la FCPE, au nom de nos valeurs, nous continuerons à accompagner Kaci et tous les autres parents d’élèves victimes de politiques injustes. Nous continuerons à dénoncer, avec force et sans relâche, comme la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme, cette volonté de « maîtriser » l’immigration qui se traduit simplement par le grave durcissement d’une politique d’éloignement inutilement coercitive. Elle précarise davantage les étrangers en situation irrégulière et ne résout pas les problèmes de fond. Cette politique brise des vies de famille et fait reculer les droits des enfants-élèves de la République.
