De la mixité à l’excellence pour tous : un défi désormais incontournable
Le récent débat sur les secteurs multi-collèges (SMC) a permis de lever des tabous et d’en finir avec le déni de réalité qui perdure dans la capitale, sans doute plus qu’ailleurs en France. Une fois ce constat fait, il convient désormais de relever le défi avec courage, rigueur et audace. Dans l’intérêt de tous.
A l’occasion de sa première rencontre avec le Recteur de l’Académie de Paris, la veille des vacances scolaires, la FCPE Paris a bien entendu évoqué le sujet des secteurs multi-collèges (SMC) à Paris. Sans nier les réserves initiales qu’elle avait apportés quant au calendrier retenu ou au faible nombre d’établissements concernés, elle a néanmoins rappelé son adhésion au principe de procéder par étapes : difficile, en effet , de ne pas être pragmatique quand on observe les réactions en chaine déclenchées autour de 8 établissements… sur 175 (collèges privés compris). Ne nous voilons pas la face : les tensions générées par ce sujet sont à la mesure de la ségrégation scolaire mais aussi du sentiment de défiance vis à vis de l’institution publique, qui s’est installé.
Il n’empêche : le contexte parisien a de quoi interpeller, notamment par la diversité des situations qu’on peut y trouver. Les quatre initiatives retenues sont en soi emblématiques de cette diversité. Dans le 18ème, 2 SMC, un collège Hors Education Prioritaire (HEP) et un collège du Réseau Education Prioritaire (REP) ainsi que deux collèges très proches géographiquement, mais qui ont connu des trajectoires récents différents, tout en étant tous deux classés en REP. Dans le 20ème, les deux collèges appartiennent à des cités scolaires contigües, toutes deux HEP. Dans le 19ème, il s’agit d’un collège qui fait partie d’une cité scolaire HEP et d’un collège « seul » REP, rapprochement déjà évoqué dans le passé. Dans la plupart de ces situations, des logiques d’évitement scolaire exacerbées se sont installées.
Aujourd’hui, à Paris, le marqueur essentiel d’un collège semble être son bassin de recrutement. On pourra incriminer la politique de la ville ou la place du privé parisien, qui pour l’heure n’est toujours pas mis à contribution, ce que nous regrettons aussi; même si ces facteurs méritent débat, ils ne peuvent servir en soi à contrecarrer toute initiative destinée à améliorer la mixité. Alors que de nombreuses études pointent du doigt le poids de l’origine sociale des familles sur l’avenir scolaire des enfants en France, il est temps de restaurer la confiance envers l’institution publique pour contrer cette logique qui associe « bassin de recrutement » et « établissement scolaire ».
Une logique presque intériorisée par une partie de la communauté éducative et qui mène accessoirement à des anomalies troublantes : comment interpréter, à ce stade, l’attitude de certains professionnels à vouloir choisir la composition sociale et scolaire des collèges où ils interviennent ? quel message veut-on renvoyer aux familles dites « éloignées » qui n’ont d’autre choix que la confiance dans le service public d’enseignement ? Il est maintenant du devoir des autorités académiques et municipales de faire preuve de cohérence et d’honnêteté.
Les secteurs multi-collèges impliquent une nouvelle dynamique à Paris et la FCPE Paris a demandé que l’Académie et la Ville donnent rapidement des signes concrets d’engagement commun. Elle veillera à ce que des moyens adaptés soient mis à disposition pour rééquilibrer les établissements et accompagner les équipes pédagogiques. Forte des remontées du terrain qu’elle a pu avoir au fil des années, la FCPE Paris s’est aussi engagée à faire des propositions, avec ses partenaires, afin non seulement d’inscrire cette dynamique dans la durée mais aussi pour qu’elle soit à la hauteur des attentes des familles.
Si tous les feux sont braqués sur les SMC, il n’en reste pas moins que les politiques de droit commun, comme la sectorisation, restent toujours des outils efficaces pour améliorer la mixité sociale dans les collèges. A l’occasion d’un réaménagement urbain dans le 17ème et l’arrivée d’un nouveau collège, c’est toute la sectorisation des collèges de l’arrondissement qui a ainsi pu être revue, comme nous le demandions depuis des années, afin de stopper la ghettoïsation de certains établissements. De son côté, l’Académie s’est engagée à soutenir les établissements qui en auront besoin, afin d’accompagner les équipes pédagogiques. La FCPE Paris salue cette démarche commune – portée à la fois par la Ville et l’Académie – en faveur de l’égalité des chances et de l’équité.
L’engagement du nouveau Recteur de Paris en faveur d’une « politique sociale d’établissement » mettant en œuvre un certain nombre de moyens d’ordre sociopédagogique, afin de lutter contre les conséquences pédagogiques des inégalités sociales augure d’une prise de conscience générale que nous ne pouvons qu’approuver.
Les inégalités scolaires n’ont rien de fatal. Et si mixité rimait avec excellence pour tous ?